Il était question de l'intelligence artificielle et de Cedille.ai, lancé par notre agence une année avant le phénomène chatGPT. Découvrez l'interview en vidéo (passé sur RTS2!), en podcast ou encore avec retranscription intégrale en texte!
L'interview, en vidéo
L'interview, en audio
La retranscription texte intégrale de l'interview
Coraline Pauchard (CP): Au Forum des idées, on s'intéresse ce soir à cette intelligence artificielle qui nous aide à écrire, résumer et générer des textes.
Bonsoir, Sébastien Flury, vous êtes le directeur de l'agence web Coteries, située à l’EPFL Innovation Park, et co-fondateur de cedille.ai. C'est de cet outil dont on va parler ce soir. Cedille.ai, c'est quoi exactement, en quelques mots ?
Sébastien Flury (SF): cedille, c'est un assistant d'écriture, basé sur de l'intelligence artificielle. Comme vous l’avez dit, c'est pour résumer, des textes, générer des histoires fantaisistes ou fantastiques. On peut s'amuser beaucoup avec : paraphraser des textes ou réécrire en langage soutenu, des sms par exemple. On peut s'amuser à faire ça aussi. C'est assez rigolo.
CP: Et vous avez lancé ce modèle de langue d'écriture en novembre 2021? Comment ? Comment tout a commencé? Qui a eu l'idée ?
SF: On est une agence et puis, c'est une idée d'équipe, ce n'est pas moi qui suis venu avec l'idée. On a beaucoup travaillé pour un client basé à Singapour, sur de l'intelligence artificielle, en anglais.
A un moment donné, c’était durant l'été 2021, deux de nos spécialistes sont venus me voir en me disant: « en français, c'est le désert, il n'y a rien de bien, il n'y a pas de modèles de langue qui fonctionnent, d'intelligence artificielle en français qui fonctionne bien. Et si on lançait quelque chose ? »
On est parti un peu la fleur au fusil. On n'a pas fait d'études de marché, mais on a senti qu'il y avait quelque chose à faire. Et puis, on s'est dit: « on y va, on va tester, on va essayer, on va essayer d'entraîner un modèle ».
Quelques mois après, on s'est rendu compte qu'on sur-performait un peu tous les modèles existants, dont le modèle open.ai en français.
CP : C’était un vrai succès ?
SF : À ce moment-là, c’était un vrai succès, déjà technologique. On s'est dit: on a lancé le processus, on est arrivé, on a fait des comparaisons, on a vu qu'on était meilleur et on s'est dit: « là, il faut lancer ». Puis on l'a lancé, le 9 novembre2021.
CP: Et, vous avez été rattrapés par la société américaine OpenAI, combien de temps après?
SF: On pensait qu'on avait six mois d'avance sur le développement. On en était à GPT 2.5, d’OpenAI,à ce moment-là. On avait cinq mois d'avance finalement. Cinq mois après, ils avaient un modèle qui était…meilleur.. Il faut savoir que ça va très, très vite. C'est assez affolant comme ça s'est développé ces dernières années. Et puis, ça a été popularisé par chatGPT en novembre 2022. Comme tout le monde le sait, ça a a été un raz-de-marée.
Novembre 2021, on est presque une année avant. On était un peu, peut être, je vais pas dire trop tôt, mais on a fait bon buzz.
CP: En tout cas, visionnaire!
SF: Je ne sais pas si on peut dire visionnaire, mais en tout cas, on était au bon moment, avec le bon outil, avec les bons éléments qui nous ont permis de créer cette intelligence artificielle.
CP: C'est vrai que chatGPTest arrivé en 2022 et a tout pris, quelque part. Il a aussi démocratisé cette intelligence artificielle. Vous avez été distancés à ce moment-là. Est-ce que vous auriez pu régater en levant des fonds, par exemple?
SF: Alors, la question s'est posée, la question s'est vraiment posée. On a eu pas mal de buzz au niveau de la francophonie. On a eu des streams sur Twitch, des vidéos, des articles de journaux dans la francophonie. C'était pas mal.
On a des investisseurs dans l’intelligence artificielle qui nous ont contactés. J'ai fait 1-2 visio-conférences, j'ai discuté un peu avec, j'ai rapidement compris que ça allait me prendre beaucoup de temps pour lever de l'argent et qu’ils demandaient un peu des métriques à l'européenne, c'est-à-dire, enfin, qui sont justes... Mais combien d'utilisateurs ? Combien paient, combien ? La première discussion, on n'avait pas encore de modèle payant.
On a lancé, on a regardé comment ça fonctionnait et après, on a commencé à développer une offre payante, parce qu'on a vu que ça fonctionnait et que les gens étaient preneurs.
Après, ça aurait pris des mois, puis finalement pour lever, peut-être, sans garantie de succès. Mais, quand on voit la course aux armements actuellement...
CP: Combien sont levés? En général ? On parle de combien ?
SF: En centaines de millions. OpenAI avait le levé 20millions, puis encore après, plus, de Microsoft. Mais là, j'ai vu quelques news. Récemment, une start-up parisienne, qui a levé 100 millions au mois de juin, une autre 450 millions, d’Amazon. C'est de la folie et en tant que petite entreprise Suisse, on aurait pu essayer de se lancer, mais je pense pas qu'on aurait réussi à lever, assez tôt.
CP: Et aujourd'hui,Sébastien Flury, comment se porte cedille et ses modèles de langue? Parce qu'il y a en français et en allemand. Il faut quand même le préciser.
SF: Oui, on a deux modèles de langue. Ces modèles de langue, on a pris l'option stratégique d'arrêter de les développer, vu qu'on n'arrivait pas régater à ce niveau-là. On a continué de développer l'application et on a fait des fonctionnalités spécifiques, vraiment pour générer du texte.
Ça se passe assez bien. On aune centaine de milliers d'utilisateurs, 3 à 5’000 nouveaux utilisateurs tous les mois. On a un grand groupe français qui utilise notre application, notre outil, directement dans ses processus, pour résumer, des textes. Un grand média français d'ailleurs. Et puis, ça roule assez bien, oui.
CP: Et peut-être très rapidement… On parle beaucoup d'intelligence artificielle européenne. Pourquoi pas, pour finalement faire concurrence à l'intelligence artificielle, surtout américaine. En deux mots : possible ou impossible selon vous ?
SF: Possible, parce qu'on a toutes les compétences. On n'est pas moins malins ou plus bêtes que les autres. Il y a vraiment des compétences. On a aussi beaucoup de gens qui ont bossé chez Google ou chez Facebook sur des modèles d'intelligence artificielles, qui sont européens. C'est d'ailleurs le cas pour cette startup parisienne. C'est des anciens de Google, qui lancent une intelligence artificielle européenne. Il y a vraiment de quoi faire.
Mais après, il faut que ça suive, il faut que les marchés suivent, il faut qu'on achète européen aussi.Ça, c'est peut-être le plus important, je dirais !
CP: Tout est encore à faire, mais rien n'est impossible. C'est peut-être ce qu'on gardera ce soir. Sébastien Flury, directeur de l'agence web Coteries et cofondateur de cedille.
Merci d'être venu ce soir nous parler de cet outil d'intelligence artificielle. Une bonne soirée à vous !
SF: Merci, bonne soirée !